Pourquoi faut-il privilégier la réputation plutôt que l’identité dans l’évaluation des talents ?

Pourquoi la réputation surpasse l'identité pour évaluer les talents efficacement.

Cet article s’inspire d’un article du Dr Hogan

Dans le monde du travail, les entreprises cherchent constamment à mieux comprendre leurs collaborateurs pour améliorer la performance, fidéliser les talents et anticiper les comportements à risque. Pourtant, une confusion persiste entre deux notions fondamentales de la personnalité : l'identité et la réputation. Alors que l’identité renvoie à la perception qu’un individu a de lui-même, la réputation correspond à ce que les autres perçoivent de lui. Selon le Dr Robert Hogan, c’est bien la réputation – et non l’identité – qui permet de comprendre et de prédire le comportement au travail. Un changement de perspective majeur dans l’évaluation des individus en entreprise.

1. Quelle est la différence entre l'identité et la réputation ?

Pendant des décennies, la psychologie de la personnalité s’est concentrée sur la quête du "vrai soi", cette identité profonde que chacun pense posséder. Gordon Allport, pionnier dans le domaine, affirmait que tout reposait sur l’identité. Pourtant, cette approche n’a abouti à aucun résultat pertinent : pas de taxonomie fiable, aucune capacité prédictive, et aucun lien solide entre identité auto-perçue et comportement observable.

À l’inverse, la réputation – autrement dit la perception des autres – s’est montrée bien plus robuste. Grâce à des outils comme le Five Factor Model, il est désormais possible de mesurer la personnalité à travers les descriptions comportementales faites par des tiers, et de les corréler à des dimensions concrètes telles que la performance, l’employabilité ou encore la satisfaction au travail.

Le constat est clair : l’identité est une construction personnelle, tandis que la réputation offre un indicateur fiable du comportement passé… et futur.

2. Pourquoi la réputation est-elle un outil de décision managériale stratégique ?

La réputation se construit dans l’interaction sociale. Chaque collaborateur joue plusieurs rôles dans l’entreprise – manager, contributeur, expert… – et c’est dans la façon d’assumer ces rôles que se façonne sa réputation. Ce regard extérieur influence directement les décisions managériales : qui mérite une promotion ? Qui est prêt pour un projet à fort enjeu ? Qui doit bénéficier d’un accompagnement spécifique ?

Prenons l’exemple d’une personne se déclarant elle-même « inapte à l’emploi ». Malgré des suggestions concrètes (comme devenir chauffeur routier), elle refusait catégoriquement : « Ce n’est pas moi. » Résultat : une absence durable d’activité professionnelle, justifiée par une identité figée mais contre-productive.

C’est là que la compétence sociale entre en jeu : la capacité à réduire l’écart entre l’image qu’on a de soi et celle que les autres perçoivent. Les collaborateurs les plus performants sont ceux qui apprennent à gérer leur réputation à travers le feedback. Cela définit la conscience stratégique de soi : non pas une introspection sur son « moi profond », mais la compréhension de l’impact réel que l’on a sur les autres… et la capacité à l’ajuster.

3. L’introspection est-elle vraiment utile dans le développement professionnel ?

L’introspection est souvent perçue comme une voie royale vers la connaissance de soi. Pourtant, les données montrent qu’elle ne constitue aucun avantage compétitif. Des figures comme Ronald Reagan, Margaret Thatcher ou Donald Trump – incapables d’introspection – ont pourtant connu un parcours professionnel fulgurant.

En réalité, ce qui importe dans une trajectoire professionnelle, ce n’est pas ce que l’on pense être, mais la façon dont on est perçu. Toute information pertinente pour progresser vient du regard des autres. L’auto-analyse isolée n’apporte rien de concret, tandis que le feedback permet un ajustement réel et productif.

Pire encore, une introspection excessive peut nuire : rumination, doute, paralysie de l’action. À l’inverse, les leaders efficaces agissent, échangent, adaptent leur comportement en continu, guidés non par leurs pensées internes, mais par le contexte et les retours du terrain.

En résumé : 3 points clés à retenir

  1. La réputation, pas l’identité, est prédictive : la perception qu’ont les autres de vous est un meilleur indicateur de vos comportements futurs que votre propre récit intérieur.
  2. La conscience stratégique de soi est une compétence clé : ajuster ses comportements en fonction des retours reçus permet d’augmenter son impact professionnel.
  3. L’introspection est surévaluée : seule la confrontation au feedback social permet un développement professionnel véritablement pertinent.

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